Un de nos ancêtres a vécu aux Forges de St-Maurice au XVIIIe siècle. Il s'agit de la famille de François De Nevers dit Boisvert et de Madeleine Piché (Pichet). Une étude intéressante sur la vie quotidienne des ouvriers des Forges nous laisse entrevoir un portrait fort intéressant de la vie de cette famille et que j'ai cru bon partager avec vous.

L'étude dont on parle a été publiée dans la collection "Histoire et Archéologie", numéro 58, par la Direction des lieux et parcs historiques nationaux, Parcs Canada, Environnement Canada, sous la plume de Mme Luce Vermette.

Notre François Boisvert est en fait un ancêtre de Rose-de-Lima Lahaie, grand-mère de mon grand-père Georges Connolly.

Parmi les autres familles faisant l'objet de cette étude, il y en a une autre qui nous est apparentée de plus loin:
Joseph Aubry: il est marié à Marie-Joseph Chevrefils, soeur de Marie-Louise qui a épousé le fameux Joseph Courchesne

Monographie de François De Nevers dit Boisvert:

François est né en Nouvelle-France, d'une famille de la région de Lotbinière. Il y épouse Madeleine Piché (Pichet) en 1722.

La famille se retrouve aux Forges en 1739, où François travaille à titre de journalier, c'est-à-dire comme homme à tout faire. Parfois il bûche, ou il est charbonnier, feuilleur; parfois il fabrique des manches de marteau, ou il fait des chemins. Plusieurs membres de la famille Boisvert travaillent également aux Forges: c'est peut-être ce qui y attire François et son épouse!

François et Madeleine ont neuf enfants, dont cinq sont nés avant que le couple ne s'installe aux Forges. Plusieurs des enfants épouseront des travailleurs des Forges

François décède au début de 1756. Il est témoin au mariage de Pierre Milot et Marie Blais le 20 janvier 1756; par ailleurs, le 26 mars de la même année, sa femme Madeleine fait dresser l'inventaire des biens de leur communauté. François est décédé entre ces deux dates. Cet inventaire nous renseigne sur la vie de la famille.

En 1741, la famille Boisvert réside dans une petite habitation rudimentaire décrite ainsi au recensement:

Une barraque où demeure Boisvert de pieux de travers
et debout couverte par 20 planches les planchers haut
et bas de madriers à joints quarrés, la cheminée de terre.

Cette baraque comporte une seule pièce chauffée par un seul âtre pour tout ce monde qui y vit, y mange et y dort. Elle offre peu de confort: sa construction simple, peu soignée et sa cheminée de terre offre peu de protection contre les incendies. Par l'inventaire de 1756, on sait qu'il s'est ajouté à l'âtre de 1741, un poêle en brique pour le chauffage et la cuisson. Le bois nécessaire au chauffage est fourni gratuitement par la compagnie des Forges. Par contre, aucun ustensile de cheminée n'est mentionné à l'inventaire, que ce soit pour l'entretien du feu ou pour la cuisson des aliments (comme crémaillère, potence etc).

L'éclairage de l'unique pièce de la maison se fait premièrement par le feu de l'âtre, et au besoin à l'aide de deux chandeliers. L'inventaire mentionne à cet effet une réserve de cinq livres de chandelles et un porte-mouchette.

On comprendra facilement que dans un espace physique aussi restreint, le mobilier soit très simple. On compte deux lits pour toute la famille, une mauvaise table pliante, trois coffres pour le rangement, une huche à pain et un rouet à filer. Le lit des parents n'est pas décrit ni estimé dans l'inventaire: il revient à la veuve selon une clause du contrat de mariage. Le second lit, est composé d'un bois (cadre en bois) de lit, de deux paillasses, d'un lit de plume en toile du pays, de deux draps et d'une couverture. En complément de lingerie de lit, on trouve une vieille paillasse, une peau de vache verte, deux vieilles couvertures et un drap. Il n'y a donc qu'un seul lit pour tous les enfants (9). Bien qu'à cette époque, deux et parfois trois enfants prennent place dans un lit, il est possible qu'une paillasse soit, le soir venu, dépliée sur le sol près du foyer.

La préparation des repas se fait sur l'unique table; comme ustensiles, on compte deux terrines et un plat. Le pain est fait à la maison comme en témoignent la huche, la gratte et le tamis. Pour la cuisson des aliments, on dispose d'un vieux gril pour les grillades, d'une vieille poêle pour les fritures et, pour les soupes, les bouillies, les pots-au-feu comme pour chauffer l'eau, on dispose de quatre marmites avec deux vieilles cuillères à pot et d'une grande fourchette. Aucune broche à rôtir.

La maison contient quelques réserves d'aliments. 40 livres de lard, 4 livres de beurre, 9 minots de farine. Les produits de l'élevage des animaux constituent un apport appréciable à l'alimentation de la maisonnée. Boisvert est d'ailleurs l'ouvrier qui possède le plus grand nombre d'animaux parmi les ouvriers dont l'inventaire nous est parvenu. Ainsi, il élève 19 volailles, une truie, trois petits cochons, un cochon d'un an, trois vaches et une génisse. Aussi n'est-il pas surprenant de trouver à leur usage cinquante bottes de foin.

Les repas se prennent à la table de la maison. On s'y assied sur les coffres ou sur des banc sans valeur (puisque non inventoriés). La vaisselle d'étain est déposée sur la table recouverte d'une nappe (il y a 3 nappes dans l'inventaire). Dans son ensemble, cette vaisselle d'étain est évaluée selon son poids, savoir 22 1/4 livres. Elle se compose d'assiettes (environ 1 livre chacune), de plats ou bassins (environ 1 livre chacun), de pots à boire et de cuillères. On peut supposer une huitaine d'assiettes, quelques cuillères. Cinq fourchettes en acier et cinq autres en fer-blanc peuvent, avec les couteaux de poche, compléter les couverts de table.

La conservation des aliments se résume à bien peu. On trouve à l'inventaire un "pot de Bordeaux", sorte de pot en grès généralement utilisé pour conserver le beurre. Aucun autre récipient de verre ou de céramique n'est inventorié. Quand au saloir, il est sans doute compris dans l'ensemble décrit comme "objets de tonnellerie" que l'on ne décrit pas mais qu'on estime à 9L* et 4s.

Pour les travaux d'artisanat, on trouve chez les Boisvert un rouet à filer, du fil, de la filasse et du coton: ceci est particulier à cette famille, puisqu'on ne retrouve pas ces choses ailleurs aux Forges.

François possède quelques outils et instruments. Ainsi il possède deux fusils, ce qu'il implique qu'il doit s'adonner à la chasse pour compléter l'alimentation de la famille. On trouve aussi deux mauvaises faux, une chaîne à charrue, une carriole et quelques ferrures.

Aucun vêtement n'est inventorié. Les hardes de la veuve et des enfants constituent des biens personnels ne relevant pas de la communauté de biens. Quand à ceux du défunt, ils sont partagés entre les enfants.

En ce qui concerne les objets de toilette, un objet retient particulièrement l'attention. Il s'agit du miroir que l'on suspend à l'un des murs de la pièce au besoin. Pour les soins d'hygiène, on trouve pour la valeur de deux livres* de savon du pays.

L'ensemble des biens meubles est évalué à 576L* 7s et 6d, dont 300L* 8s sont consacrés à l'estimation des animaux. A part Chevrefils, qui est beaucoup plus âgé que François, ce dernier est celui qui possède le cheptel le plus considérable. Le mobilier s'élève donc à la somme de 276L* , le lit de la veuve et les vêtements non compris. Malgré ces omissions, cette somme est bien peu élevée à comparer avec d'autres familles des Forges.

Le salaire annuel de François, aux Forges, est de 360L*. Ce salaire se compare désavantageusement au salaire moyen de 580L* pour l'ensemble des ouvriers des Forges qui ont fait l'objet de l'étude qui nous occupe. Ceci s'explique par deux raisons: François est un ouvrier non spécialisé (les ouvriers spécialisés on tous de meilleurs salaires), et il est jeune.

 

L'argent de l'époque

Livre française:

Symbole: L - par exemple "200L"
Sous-unités: 1L = 20s (sols), 1L = 240d (deniers), 1s = 12d (deniers)
Valeur: on verra qu'un ouvrier non spécialisé aux Forges gagne environ 1L par jour.

Livre anglaise:

Symbole: £
Sous-unités: 1£ = 20s (shillings), 1£ = 240p (pences), 1s = 12

L'équivalence est la suivante: 1£ = 24L

 

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